Sa timidité est une vraie couverture !
Ange Patricia Kouamé, petite et menue est une jeune ivoirienne d’une vingtaine d’année. Elle est étudiante en licence de communication, option journalisme à l’université FHB d’Abidjan Cocody. Calme de prime abord, elle passerait presqu’inaperçue. Pourtant elle se présente comme « écrivaine, poète, slameuse ». Elle partage son expérience avec Obasima pour parler de ; son quotidien, ses études, ses loisirs. En gros, la vie pas ordinaire d’une étudiante en licence 3 de communication.
Des livres en cadeau, des livres de toute discipline
« Je suis issue d’une famille chrétienne modeste qui très tôt m’a inscrit à l’école du dimanche ». Là-bas, elle rencontre une monitrice avec qui elle apprend à aimer la lecture. « Mon père m’offrait des livres de mathématiques pendant les vacances pour relever mon niveau » dit-elle. Sa monitrice l’encourage à faire beaucoup de lectures, elle lui donne des textes à lire et l’encourage à en écrire. Ça ne la quitte plus, elle lit et rédige parfois des textes. Elle développe des capacités rédactionnelles appréciées de ses professeurs de français. L’influence de cette monitrice lui ouvre donc les portes de l’écriture qui devient son principal loisir. En 2015 elle écrit un texte et quelqu’un attire son attention sur le caractère poétique du texte en question. Elle se dit encore surprise de cette remarque. Selon elle, ce texte était ordinaire et elle avance que « la poésie est un genre très difficile qui demande un esprit très critique pour faire de la poésie, ce qui fait que ça ne m’a pas intéressé au départ »
C’est pour elle un fait commun que d’aimer lire et écrire, elle intègre néanmoins un comité littéraire pour la libération par le livre.
Au sein de ce comité, elle exploite sa passion : la lecture mais continue d’écrire. « Une fois, au cours d’une cérémonie j’ai eu la charge de dire le mot de bienvenue, j’ai préparé un texte que j’ai lu. C’était discours avec des rimes ». Son texte est fort apprécié au point où un poète, slameur surnomme H2O attire son attention sur le caractère poétique du texte. « Il sentait de la poésie dans le texte » dit-elle avec amusement. Ange se dit toujours surprise de cette affirmation ; c’est un hasard comme son orientation au département de Communication.
Slameuse avec « brin de poésie »
Le bac en poche, Ange souhaite faire du Droit mais ses plans changent avec son orientation. « Je n’ai pas choisi cette filière à l’université, j’ai été orientée malheureusement ou heureusement en communication ». Elle s’y met néanmoins et après la deuxième année, au moment de choisir une option, elle a un penchant pour la communication politique. Seulement, on lui déconseille cette option ; « l’un de mes enseignants m’a dit que j’avais déjà un atout pour être une bonne politicienne et que je pouvais me former en politique à travers d’autres canaux. Je devais donc choisir une autre branche en complément de cet atout » affirme-t-elle. A cause de sa timidité, elle rejette le marketing qui demande beaucoup de contact ; la communication pour le développement ne l’intéresse pas non plus. « Avec le journalisme, je peux toucher à tout, tout dire… ». Ce tout n’exclut pas l’écriture, la poésie s’impose à elle, elle écrit et ses activités extrascolaires prennent le dessus. Elle ne s’arrête pas au statut de poète écrivain, elle passe à une autre étape. Selon Ange, « quand on dit poète, ce sont ceux qui écrivent et lorsqu’on passe au niveau du slam, tu écris et tu viens déclamer sur scène ». Elle apprend auprès de H2O qui fait du slam et l’encourage à faire des churchlines (courant du slam dont les textes sont basés sur la Bible).
Dans le même élan, elle côtoie ce milieu et commence à faire des scènes, à déclamer sur ses propres textes. C’est difficile d’être mise en avant pour la timide qu’elle est mais son talent s’impose. Elle est aujourd’hui auteure, slameuse, elle a sorti un livre ; un recueil de poèmes intitulé « Brin de poésie ». C’est le prix remporté en tant que lauréate de la cinquième édition du festival poétique chez les jeunes. Elle le dit avec désinvolture comme si c’était ordinaire, avec une petite lueur dans les yeux tout de même. Elle a fait de son loisir une passion et ses moments de détente sont la promenade, le footing et la natation.
Ange a très peu d’amis et reste proche de sa famille. « J’ai les meilleurs parents au monde. Ils m’encouragent même face à mes échecs. Mon père trouve que c’est bien » dit-elle ; elle ajoute « maman m’a conseillé de me concentrer sur mes études parce que l’écriture ne nourrirait pas vraiment son homme ». Cet accompagnement familial lui permet de bien mener ses études et de poursuivre sa passion.
S’adressant aux jeunes filles, elle dit : « il est temps de se ressaisir et ne pas tout attendre des hommes. Il faut se reprendre à tous les niveaux. Nous devons continuer les combats que les hommes peinent à mener. »